Café interdit aux Juifs: l’auteur s’était excusé
C’est une lettre d’excuses envoyée par l’auteur de l’affiche «L’entrée est autorisée aux chiens mais aux sionistes en aucune façon», placardée sur la vitrine d’un café turc de Saint- Nicolas, qui a motivé le classement sans suite du dossier par le parquet de Liège. Une motivation «surréaliste», estime la Ligue Belge contre l’Antisémitisme.
On sait maintenant ce qui a poussé la justice liégeoise à classer sans suite le dossier lié à l’affiche antisémite placardée sur la vitrine de l’Anadolu, un café turc de Saint-Nicolas, en juillet 2014: «Une médiation pénale avait été proposée mais refusée par le plaignant, détaille Catherine Collignon, Premier substitut au parquet de Liège, en charge des relations avec la presse. L’auteur a alors présenté ses excuses au plaignant via un courrier circonstancié. L’auteur n’avait pas pris la mesure de ses propos. Le dossier a alors été classé sans suite. Mais c’est une procédure qui a quand même duré presque deux ans, ce dossier a été traité avec beaucoup d’attention par le parquet.»
Du côté de la Ligue Belge contre l’Antisémitisme (LBCA), on s’étonne pour le moins de cette décision, mais aussi de sa justification. C’est la LBCA qui avait en effet dénoncé les faits en 2014, après avoir été contactée par le plaignant qui avait constaté la présence de propos ouvertement antisémites, rappelant les affiches apposées devant certains commerces durant l’Allemagne nazie: «L’entrée est autorisée aux chiens mais aux sionistes en aucune façon». Des inscriptions doublées d’une version en turc qui faisait cette fois référence explicitement aux Juifs.
«C’est Magritte qui fait de la politique, s’insurge Joël Rubinfeld, le président de la LBCA. C’est complètement surréaliste. L’affiche qu’il avait placardée tombe sous le coup de la Loi Moureaux, qui réprime le racisme et la xénophobie de manière incontestable. Or, pour le parquet de Liège, quand on enfreint la Loi, il suffit de s’excuser pour annuler la faute? Ce n’est pas une manière saine de rendre la justice.»
La Ligue Belge contre l’Antisémitisme, dont l’avocat a écrit au parquet liégeois, attend maintenant confirmation écrite de ce classement sans suite et de ses motivations avant de prendre attitude. «Et si tout cela est confirmé, nous analyserons les différentes voies légales pour contrer cette décision et rouvrir le dossier, termine M. Rubinfeld. Ce que nous voulons, c’est qu’un tribunal statue sur ce dossier, à charge et à décharge, et applique ensuite la Loi. Loi qui, ici, a été violée de manière flagrante.»
GEOFFREY WOLFF