Les habits neufs de l'antisémitisme en Belgique

Joël Rubinfeld |


Cette étude constitue le chapitre consacré à la Belgique de l'ouvrage collectif «Les habits neufs de l'antisémitisme en Europe» (Editions Café Noir, 2004).


FRA

La Belgique, comme d’autres pays européens, aura vécu un automne de fin de siècle marqué par un réveil de la judéophobie. Jusque-là, les actes antisémites se comptaient, d’année en année, sur les doigts d’une main, mais l’onde de choc générée par la seconde intifada allait rapidement modifier la donne pour la communauté juive du Royaume, forte de 40.000 âmes. En 2001, 27 actes antisémites déclarés seront à déplorer, 51 l’année suivante, et 30 en 20031. Le Conseil de l’Europe s'inquiètera de la récurrence de ces incidents, et dénoncera l’antisémitisme – ainsi que le racisme – qui s’est développé en Belgique, à travers un rapport rendu public en janvier 2004. L’étude répercutait le malaise de Belges juifs qui «ont connu un renforcement très important du sentiment d’insécurité au cours des dernières années en Belgique»2.

La Belgique n’est pas pour autant un pays antisémite. S’il y a soixante ans, des lois antisémites étaient en vigueur dans le pays, aujourd’hui la loi belge réprime l’antisémitisme. La situation actuelle n’est donc pas comparable à celle qui prévalait à l’époque, mais elle en porte toutefois des stigmates communs: des rabbins et des écoliers juifs sont passés à tabac sur la place publique, des cocktails molotov embrasent des commerces et lieux de culte juifs, et l’on crie «Mort aux Juifs» en battant le pavé de la capitale.

Pour la plupart, les actes antisémites seront le fait de jeunes issus de l’immigration des pays du Maghreb3, aujourd’hui citoyens belges. En mal d’intégration, ceux-ci ont trouvé dans le conflit opposant Israéliens et Palestiniens un exutoire rendu fertile par la rencontre d’une information proche-orientale manichéenne et d’un antisémitisme des plus traditionnels. Ces jeunes ne sont pour autant pas les seuls à porter la responsabilité de la libération de cette violence. Ceux, étrangers à la communauté musulmane, pour qui la critique du sionisme ou d’Israël n’est que le cache-sexe d’un antisémitisme inavouable, ont directement participé à la vivacité de l’actuelle judéophobie. Issus des milieux associatif, académique, journalistique et politique, ils ont pavé le chemin aujourd’hui emprunté par ceux qui passent à l’acte.

Un antisémitisme désinhibé

De nos jours, il peut être dangereux d’arborer une kippa sur la tête ou une étoile de David au cou. Si le nombre officiel des actes antisémites répertoriés depuis le mois d’octobre 2000 dépasse la centaine, ce chiffre ne permet pourtant pas de prendre la réelle mesure de la situation, car nombreux sont ceux, surtout parmi les plus jeunes, qui taisent leurs mésaventures.

D’autres ne portent plus plainte. C’est le cas du rabbin Shimon Lasker qui, blasé, concède que s’il devait porter plainte à chaque fois qu’il était insulté ou agressé, il passerait sa vie dans les commissariats. S’il l’avait fait, il aurait du même coup fait augmenter, à lui seul, de moitié le nombre d’actes antisémites répertoriés en Belgique depuis la fin de l’année 2000. Il se souvient de ce début du mois d’octobre 2001, lorsqu’il se fera agresser à trois reprises en 24 heures. Le 2 octobre, premier jour de la fête juive de Souccoth, le rabbin marchait avec sa femme et ses enfants dans la rue quand une dizaine de jeunes maghrébins les prirent à partie, crachant sur leur passage, les insultant de «sales Juifs», menaçant de les tuer et se servant de pierres et de marrons, qui jonchaient le sol, comme munitions. Même scénario le lendemain, quand une cinquantaine d’adolescents arabo-musulmans s’attaquèrent à nouveau à lui et à sa famille, touchant au dos la fillette du rabbin Lasker à l’aide de projectiles improvisés. Quelques heures plus tard, c’est seul cette fois que, sur le chemin de la synagogue, il se fera agresser par quatre jeunes qui menaceront de l’égorger puis lanceront une poubelle sur le rabbin.

Il ne doit guère rester de rabbins à Bruxelles qui n’aient eu maille à partir avec ceux qui n’hésitent plus à joindre le geste à la parole. Le Grand rabbin de Bruxelles Albert Guigui en a également fait la triste expérience. Une après-midi de décembre 2001, il croisera le chemin de cinq adolescents maghrébins qui, à sa vue, se mirent à l’insulter et à lui cracher au visage, avant que l’un d’entre eux ne décoche un violent coup de pied au visage du Grand rabbin. Le Congrès rabbinique européen qui se tiendra quelques mois plus tard à Bruxelles fut l’occasion pour des rabbins venus des quatre coins du continent de constater in vivo les difficultés rencontrées au quotidien par leurs coreligionnaires belges. Chaque jour, des incidents – crachats, insultes et bousculades – émailleront leur séjour dans la capitale européenne.

Les adolescents qui fréquentent les écoles et les mouvements de jeunesse juifs sont également devenus la cible de «ratonnades» antisémites. C’est le cas des élèves de l’athénée Maïmonide qui, à plusieurs reprises, seront agressés aux abords de l’établissement scolaire. En mars 2003, huit étudiants venaient de quitter le lycée pour se rendre à la station de métro toute proche, lorsqu’une trentaine de jeunes maghrébins se mirent à lancer des pierres dans leur direction, les menacèrent, les insultèrent de «sales Juifs», puis s’en prirent à Nathanaël, âgé de 14 ans, l’immobilisant au sol pour le rouer de coups. Deux de ses camarades tenteront de lui venir en aide, mais ils seront à leur tour tabassés, devant une foule de badauds détournant pudiquement le regard. En janvier 2004, Nathanaël sera à nouveau rossé par une bande d’antisémites en herbe. La répétition de ces actes obligera la direction de l’athénée à déconseiller à ses élèves l’utilisation de la station de métro proche de l’établissement scolaire.

À l’université, les tracts outranciers se multiplieront au gré de l’actualité internationale et des étudiants juifs seront menacés de mort. Sur le campus, ce sont les militants d’associations estudiantines d’extrême-gauche et arabo-musulmanes qui se chargeront de l’agit-prop antisioniste. On les verra notamment établir des simulacres de check-points israéliens aux principaux accès du campus de l’Université libre de Bruxelles (ULB).

Certaines voix plus porteuses ajouteront au climat pesant. Parmi d’autres, celle de la Fédération des Etudiants Francophones – l’organisation ombrelle des étudiants de la Communauté française de Belgique – qui «condamne de manière ferme la politique discriminatoire et colonialiste de l’Etat d’Israël, qu’il mène depuis sa création»4, veut imposer «un moratoire aux accords de coopération existant avec les universités de Jérusalem et de Tel-Aviv»5 et demande l’application du «droit au retour des réfugiés expulsés depuis 1948»6.

En avril 2001, pas moins de 327 professeurs, assistants et chercheurs universitaires emboîteront le pas aux pourfendeurs de l’Etat hébreu. Dans une missive adressée au Gouvernement belge, les universitaires exigeaient de celui-ci qu’il condamne «les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis en violation du droit humanitaire par l’armée israélienne», et qu’il adopte «l’envoi immédiat d’une force d’interposition et d’observation en Palestine»7. Entre autres requêtes, ces universitaires réclamaient également aux autorités du pays «la suspension de l’Accord d’association économique conclu entre la Communauté européenne et Israël» car, ajouteront-ils subrepticement, «ce type de politique a d’ailleurs fait ses preuves dans le cas de l’Afrique du Sud»8.

C’est dans cette atmosphère qu’une universitaire candidate aux élections facultaires verra sa photo maculée de croix gammées. «Je n’ose plus mettre mon étoile de David. Je me sens obligée d’être discrètement juive. (…) C’est psychologiquement intolérable»9, déplorait-elle. En novembre 2002, quelques membres de l’Union des Etudiants Juifs de Belgique tenteront de calmer le débat. À l’aide d’une campagne d’affichage sur le campus de l’ULB, ils appellaient à l’établissement d’un dialogue serein entre «pro-Israéliens» et «pro-Palestiniens», rappelant au passage les atouts démocratiques de l’Etat hébreu. Cette campagne vaudra à ses instigateurs d’être menacés oralement et par écrit: «On connaît ton frère, ta copine. On connaît ton adresse. Enlève les affiches immédiatement ou tout le monde est mort. Ton frère, ta copine, tout le monde est mort!»10.

Le corps professoral ne sera pas épargné par la délinquance antisémite. En novembre 2002, David Berman, enseignant à l’athénée public bruxellois Marcel Tricot, se fera insulter par quelques-uns de ses élèves de confession musulmane: «Toi et les tiens, vous tuez nos frères palestiniens. Hitler n’en a pas tué assez. On te fera la peau …»11. Ironie du sort, l’enseignant agressé est membre de l’Union des Progressistes Juifs de Belgique, une association qui appelle à la suspension de l’accord d’association Europe-Israël, rend des visites de courtoisie à Yasser Arafat et qualifie Ariel Sharon de «criminel de guerre».

Les commerces et lieux de culte juifs seront également dans le collimateur. Les cocktails molotov jetés ces dernières années sur des synagogues se comptent par dizaines. En juin 2003, le Bruxellois Ali El Bouyeri embarquait cinq bouteilles de gaz dans sa voiture et tentera, «au nom d’Allah», de faire exploser son véhicule devant la synagogue de Charleroi. Un an plus tôt, une quinzaine d’impacts de balles étaient relevés sur la façade de cette même synagogue. Au même moment, un magasin bruxellois d’alimentation kasher et d’articles religieux était ravagé par un incendie criminel. Çà et là, il y aura également des vitrines brisées, des croix gammées et autres insultes antisémites sur les façades de commerces appartenant à des Juifs ou, à l’aéroport de Bruxelles-National, sur les bagages de passagers en provenance d’Israël.

Les manifestations sportives donneront aussi lieu à des débordements antisémites. En juillet 2003, un match de football opposait une équipe locale à un club israélien. À leur arrivée sur le terrain, les joueurs israéliens étaient accueillis aux cris de «Dehors les Juifs!» et «Hamas, Hamas!». En janvier 2004, c’est le match de football en salle Belgique-Israël qui dégénérait. Dans la salle, une cinquantaine de supporters arabo-musulmans déployèrent des drapeaux du Hamas et du Hezbollah, crachèrent sur les joueurs israéliens et scandèrent en chœur: «Hamas, Hamas, tous les Juifs au gaz! Mort aux Juifs! Égorgeons les Juifs!».

Les panarabes et les islamistes

On estime à 500.000 le nombre des Musulmans de Belgique, pour une population de dix millions d’habitants. C’est au sein de cette communauté que l’on retrouvera ceux qui, isolément ou sous la houlette d’adeptes du panarabisme et/ou d’un Islam radical, ont perpétré la majeure partie des actes antisémites recensés ces dernières années.

En 2000, Dyab Abou Jahjah fondait à Anvers l’Arab European League (AEL) afin de «promouvoir et défendre les intérêts des communautés immigrées arabes et islamiques en Europe, et d’établir avec les autres une interaction positive basée sur le respect mutuel et la tolérance». Derrière cette déclaration de principes, se cache un mouvement extrémiste inspiré par le panarabisme et qui, dans une ville où un électeur sur trois vote pour l’extrême-droite, tentera de fédérer les jeunes arabo-musulmans en rupture avec la société. L’AEL, qui joue résolument la carte de la communautarisation – l’instauration de l’arabe comme langue nationale compte parmi ses revendications –, sera à l’origine des cortèges les plus antisionistes et antisémites qu’ait connu la Belgique depuis le début de la seconde Intifada.

Abou Jahjah s’est fait connaître du grand public en avril 2002, suite à une manifestation pro-palestinienne organisée par l’AEL. Ce jour-là, des «Mort aux Juifs» fuseront du cortège et des vitrines de diamantaires juifs seront brisées par une horde de manifestants déchaînés. Deux mois plus tard, c’est aux cris de «Hamas» et «Hezbollah» que les manifestants de l’AEL défileront à Anvers en brûlant, sous les vivats de la foule, l’effigie d’un Juif religieux.

Né au Liban en 1971 d’un père chiite et d’une mère maronite, Abou Jahjah vit en Belgique depuis 1991. À son arrivée, il déclarait au Commissariat belge des réfugiés avoir activement pris part, trois années durant, aux opérations du Hezbollah, jusqu’à ce qu’une dispute avec le chef de l’organisation terroriste, le Cheikh Nasrallah, ne le contraigne à s’exiler en Belgique12. Installé aujourd’hui à Anvers, il continuera, à travers l’AEL, à militer à partir de la métropole flamande puisque, d’après lui, «Anvers est le bastion du sionisme, et c’est pourquoi cette ville doit devenir la Mecque de l’action pro-palestinienne».

Le site Internet13 de l’AEL sera le porte-voix d’Abou Jahjah. On y lira par exemple qu’Anvers est »une ville où les gangs pro-Sharon de fanatiques sionistes dictent la loi», une ville dont «le pouvoir est dans les mains du lobby sioniste». Le site prônera également la fin de l’Etat d’Israël, qualifié de «régime sioniste d’Apartheid (…) bâti sur le génocide et le nettoyage ethnique». En décembre 2002, Ahmed Azzuz, président de la section belge de l’organisation, entérinait la position de l’AEL à l’égard de l’Etat hébreu: «Nous ne reconnaissons pas Israël! Cet Etat n’existe pas pour nous!». Sur les Juifs, il ajoutera: «Je ne reconnais pas Israël! Donc ce peuple non plus. Donc ils n’existent pas!»14.

Les ambitions d’Abou Jahjah ne se limiteront pas à au microcosme anversois. En 2003, il s’engageait, sans grand succès, dans l’arène politique belge, à la tête d’un parti créé pour l’occasion avec un transfuge du parti écologiste flamand et des militants trotskistes et maoïstes. Parallèlement, il œuvrera pour donner à l’AEL une dimension européenne. Ainsi, Abou Jahjah inaugurait en 2003 la section hollandaise de l’association panarabe et travaille actuellement à l’établissement d’antennes en France et en Angleterre. Laissant augurer des activités de l’AEL dans l’Hexagone et outre-Manche, on verra d’emblée les militants de la section batave scander des slogans antisémites et bouter le feu à un drapeau israélien lors d’une cérémonie qui commémorait la fin de l’occupation nazie aux Pays-Bas. Le porte-parole local de l’AEL, Naïma Elmaslouhi, n’hésitera pas à déclarer dans un quotidien néerlandais: «Le slogan «Hamas, Hamas, Hamas, les juifs au gaz» n’est pas porteur, mais je ne le condamne pas…»15.

Cyniques, Abou Jahjah et ses comparses se plaisent à jouer des failles du système démocratique. Là où le bât blesse, c’est qu’ils sortiront à plusieurs reprises du cadre de la loi belge réprimant l’antisémitisme, sans pour autant provoquer la levée de boucliers que l’on est en droit d’attendre d’une démocratie alerte. Mia Doornaert, journaliste pour l’un des principaux quotidiens flamands, sera l’une des rares dans la profession à s’ériger contre l’apathie des autorités belges: «Quand il [Abou Jahjah] diabolise les «juifs» et le« lobby sioniste», les rendant responsables de tous les malheurs des musulmans, personne ne réagit. L’antisémitisme est-il un racisme politiquement correct?»16.

À Bruxelles, ce sont les islamistes qui serviront de relais aux tensions communautaires. Fondé à Bruxelles en 1991 par le Cheikh franco-syrien Bassam Abou Ata Ayachi, le Centre islamique belge (CIB) est depuis devenu un vivier de l’activisme islamiste dans la capitale. C’est par ailleurs le Cheikh Bassam qui mariera à Bruxelles l’assassin du commandant afghan Massoud. Le site Internet17 lié au CIB donne un aperçu de l’idéologie de l’organisation islamiste. Les Juifs seront qualifiés de «fils de porcs et de singes», d’autres appelleront à l’anéantissement d’»Israheil» et un sondage invitera l’internaute à pronostiquer la date de «la fin de l’entité sioniste».

Le site héberge également moult textes de théologiens musulmans qui prônent «les Vertus du Martyre» et la haine du Juif. C’est le cas du Cheikh Abou Al-Walid Al-Ansari qui s’appuiera sur des versets coraniques pour définir les Juifs comme étant «des gens indignes, désobéissants et transgresseurs, (…) lâches, consternants et faibles, (…) aimant semer le trouble et répandre la corruption sur la terre» et dont «l’extrême arrogance est la vraie nature». Il expliquera ensuite qu’»il est évident qu’Allah a promis d’accabler les Enfants corrompus d’Israël d’un horrible tourment qui leur sera infligé par Ses serviteurs croyants», et que le «peuple juif périra» si l’»Oumma (…) se munit de destriers de guerre et se prépare à combattre pour la cause d’Allah»18.

Le CIB profitera de la polémique née en France autour du voile islamique pour exprimer ses points de vue jusqu’au-boutistes. À travers une lettre ouverte, le Cheikh Bassam adressera un avertissement aux autorités françaises quant aux conséquences d’une loi interdisant le port du voile à l’école: «Lorsque le dialogue est coupé, le terrorisme commence. (…) Et alors la mort deviendra belle Monsieur Sarkozy, Monsieur le Ministre de l’Intérieur de la France!». Le Cheikh ajoutera que «quand ils [les Musulmans] arrivent au bout d’un chemin bloqué qui se termine par un tunnel obscur (…) à ce moment, se jeter vers la mort devient quelque chose de beau». Au passage, il dénoncera pêle-mêle «les mariages des homosexuels, (…) l’apartheid en Palestine, (…) Ariel Sharon, le criminel de guerre, (…) l’oppression des Sionistes»19.

En 1997, Jean-François Bastin rejoignait le CIB. Converti à l’Islam en 1972, le désormais Cheikh Jean-François Bastin Abdullah Abu Abdulaziz deviendra le dauphin du Cheikh Bassam. En 2003, le Cheikh Bastin utilisera la plateforme du CIB pour lancer un parti islamiste, le Parti Citoyenneté et Prospérité20 (PCP), qui se revendique antisioniste et qui rencontrera, en mai 2003, le suffrage de plus de 8.000 Bruxellois.

Le PCP se fera également entendre sur la question du voile, et collaborera avec l’AEL pour l’organisation de manifestations à Bruxelles. En janvier 2004, le PCP débarquait à Paris pour défiler aux côtés de l’islamiste antisémite Mohammed Latrèche. On retiendra enfin la récente arrestation en Turquie de Muhammed el Amin Bastin, fils du leader du PCP, dans le cadre de l’enquête sur les attentats qui, en novembre 2003, avaient notamment pris pour cible deux synagogues d’Istanbul. Le fils du Cheikh Bastin sera également soupçonné par les autorités turques d’avoir fréquenté les camps de formation d’Al-Qaïda en Afghanistan.

Une étrange idée du progrès

En 1967, le transfert de la charge de l’occupation – des mains égypto-jordaniennes à celles israéliennes – à l’issue de la Guerre des Six Jours aura suffi pour que de nombreuses ONG et autres âmes dites progressistes s’inquiètent désormais du sort des Palestiniens. Si le soutien au peuple palestinien est légitime, l’activisme à outrance qui s’est développé autour de ce thème versera régulièrement dans les excès que l’on connaît. D’entre tous, c’est probablement à Pierre Galand que reviendrait la palme de cet extrême militantisme.

Fidèle de Castro, Pierre Galand est un cacique du tiers-mondisme belge. De 1967 à 1996, il dirigera la section belge de l’ONG internationale Oxfam21. La hargne dont il fera preuve pour attaquer, selon ses propres dires, le «véritable système d’apartheid»22 que serait l’Etat hébreu, laissera des traces au sein de l’ONG et ouvrira la porte aux amalgames les plus douteux. Ce sera le cas de Francine Naveaux, l’une des dix Belges de la mission civile d’Oxfam qui, en juillet 2002, s’est rendue en Cisjordanie. De retour en Belgique, elle déclarait sur les ondes de la radio publique «qu’il allait falloir faire un travail sur nous-mêmes pour ne pas devenir antisémites»23.

Président de l’Association belgo-palestinienne24 (ABP) et de diverses ONG, Pierre Galand se présentera aux élections législatives de 2003 et, bien que militant sous la bannière socialiste, le Parti communiste appellera ses sympathisants à voter pour le candidat Galand. Trop court en voix, c’est à la bienveillance des instances socialistes – qui le coopteront – qu’il devra le droit de siéger au Sénat belge. Le jeune sénateur de 63 ans posera un de ses premiers actes politiques lorsque, accompagné par des militants de l’ABP et filmé par la télévision publique, il débarquera dans un supermarché pour étiqueter d’un «STOP - Fruits de l’occupation» les agrumes en provenance d’Israël.

Pour taire la contradiction, Pierre Galand n’hésitera pas à recourir aux vieilles méthodes staliniennes. C’est ainsi qu’en novembre 2002, quelques coups de téléphone lui auront suffi pour exclure le secrétaire général de l’association des Amitiés belgo-israéliennes (ABI) – l'auteur de ces lignes – d’une conférence-débat à laquelle il était également convié. Lorsqu’il sera questionné, le soir du débat, sur l’absence du représentant de l’ABI, il rétorquera que ce dernier est «un homme de la propagande israélienne», avant de lâcher un retentissant «Je suis Belge, moi!»25. En parlant en ces termes d’un citoyen exclusivement belge, Galand renouait de la sorte avec l’antienne antisémite du Juif éternel apatride. C’est dans cette atmosphère qu’à l’issue de la conférence, un spectateur coiffé d’une kippa s’entendait dire par un quidam: «Nous n’aimons pas cela ici!».

En octobre 2001, Pierre Galand déclarait: «Je suis fils de terroriste. C’est sous ce mandat-là que mon père a été arrêté pendant la guerre par les nazis. Que veut dire terroriste quand on parle du peuple palestinien qui se bat contre une occupation?»26. Une semaine plus tard, le lendemain de l’assassinat du ministre israélien Rehavam Zeevi, Galand réunissait 600 personnes pour une grand-messe anti-israélienne au cours de laquelle un de ses invités, l’antisioniste Michel Warschawski, rendra hommage, sous un tonnerre d’applaudissements, au FPLP qui «nous a débarrassés de ce pourri de Zeevi». En fin de soirée, Pierre Galand conclura, sourire en coin, en ces termes: «Les associations sionistes sont en train de nous attaquer parce qu’elles se rendent compte que, petit à petit, les gens deviennent intelligents»...

Dans un autre registre, le site Internet Indymedia27, acteur online de la scène altermondialiste, hébergera côte à côte des écrits négationnistes, pro-palestiniens, antisémites et antisionistes. Photos à l’appui, les internautes découvriront qu’Israël «veut construire sur un millier de kilomètres un mur haut de huit mètres». Une autre photo montrera Paul Wolfowitz, dans la ligne de mire, avec pour légende: «Jewish homicidal strategist Wolfowitz».

Par ailleurs, le modérateur du forum du site jugera utile de préciser aux internautes que «tout propos raciste, antisémite et sioniste» sera censuré. Si les propos «sionistes» sont bel et bien interdits de cité, l’antisémitisme a, lui, portes ouvertes, notamment avec ce texte qui, en 2003, dénonçait le «mythe juif de l’Holocauste, (…) le lavage de cerveaux des lycéens, et des citoyens en général, pour «exterminer» toutes les voix qui peuvent semer le doute sur l’existence de l’Holocauste, (…) les forces du mal qui agissent globalement à l’échelon mondial dans une guerre totale pour judaïser notre planète, (…) la domination et l’occupation politique illégitime que le pouvoir juif exerce sur les pays occidentaux». L’auteur de conclure par un appel à la mobilisation: «Ce fanatisme et cet obscurantisme juifs menacent dangereusement notre civilisation et la paix mondiale. Chacun de nous peut et doit faire quelque chose de concret pour défendre notre liberté»28.

Le quatrième pouvoir à l’œuvre

La fulgurance de la victoire militaire israélienne en 1967 sur sept armées arabes aura sonné le glas du statut d’underdog dont jouissait, jusque-là, l’Etat hébreu. Pour certains journalistes, Yasser Arafat devenait le récipiendaire de la Révolution orpheline, cette même année, du Che. C’est ainsi que l’acte de foi allait empiéter sur l’article de fond, et que David deviendra Goliath.

En renonçant à la déontologie au profit de l’idéologie, ces journalistes allaient, au fil des ans et des guerres, retourner l’opinion publique. Si en 1967 des milliers de Belges non-juifs descendaient dans les rues pour manifester leur solidarité à l’égard d’un Etat d’Israël dont l’avenir semblait alors incertain, cette nation est aujourd’hui considérée en Belgique comme étant le premier danger planétaire. En 2003, un sondage de la Commission européenne (CE) révélait que pour 63% des Belges, Israël représente la principale menace pour la paix dans le monde, devant les Etats-Unis (59%), l’Irak (54%) et l’Iran (54%)29. Ces résultats, condamnés entre-temps par le président de la CE Romano Prodi, auront tout de même le mérite d’avoir mesuré scientifiquement l’impact de trois décennies d’information biaisée.

S’il est probable que la majorité des Belges soutienne le droit naturel qu’a l’Etat d’Israël à exister, l’on voit toutefois poindre, çà et là, la contestation de ce droit. Certes, une critique sévère de la politique israélienne ne fait pas du journaliste qui l’émet un agent au service d’un obscur complot qui viserait à la fin d’Etat juif. Il n’empêche que, des mots en libérant d’autres, cette critique peut servir de marchepied à des opinions nettement plus radicales.

Par ailleurs, la couverture à outrance du conflit israélo-arabe opérée par certains médias laisse perplexe. Comment expliquer que ce conflit de «basse intensité» soit à la Une de l’actualité internationale depuis tant d’années, tandis qu’un génocide était discrètement perpétré au Rwanda, que deux millions de Soudanais payèrent le prix d’une guerre civile aussi meurtrière qu’oubliée et que le Tibet rend l’âme dans l’indifférence la plus totale?

Au sein de la presse écrite, c’est probablement le journal Le Soir qui accorde le plus d’espace au conflit israélo-palestinien. Premier quotidien francophone du pays, il l’est aussi par son empathie à l’égard des Palestiniens et sa sévérité envers les gouvernements israéliens successifs. L’omission, l’euphémisme, la périphrase, le titre ou le courrier des lecteurs seront autant d’artifices utilisés pour formater la pensée du lecteur.

Le choix du titre est important car il permet de capter l’attention du lecteur, il donne à ce dernier une idée succincte du texte qu’il chapeaute. Un intitulé porteur de tristesse et d’émotions disposera le lecteur à transférer ces sentiments sur tout le texte. Sur le seul second semestre de l’année 2001, quelques-uns des articles consacrés aux Palestiniens seront ainsi titrés: «Les Israéliens nous étranglent», «Un quotidien et une injustice insupportables», «Ils les Israéliens sont venus et ont démoli nos maisons», «La lassitude désespérée des Palestiniens». Dans un même temps, ce sont des intitulés chargés d’indignation et d’agressivité qui chapeauteront les articles se rapportant à Israël: «La Mort a un gouvernement», «Israël: hystérie antibelge», «Quand l’armée bâillonne la presse», «Humeur guerrière en Israël», «Israël a franchi toutes les lignes rouges», «Le refus obstiné de la paix», «L’intervention israélienne vire au bain de sang», «Israël envoie paître les Européens». Le 19 octobre 2001, soit deux jours après l’assassinat du ministre israélien du Tourisme par un commando terroriste du FPLP, le quotidien titrera sans complexes: «Israël reprend l’initiative militaire»…

Le militantisme du quotidien transparaîtra également dans le corps du texte. En novembre 2000, Agnès Gorissen relatait la visite de solidarité faite par une délégation de la communauté juive de Belgique en Israël. D’emblée, le ton était donné: «Le Hezbollah et Israël sont en guerre. De quoi conforter ces juifs de la diaspora venus manifester leur soutien à l’Etat hébreu». Elle ironisera ensuite sur le fait que «les juifs, israéliens ou non, reprochent constamment à la presse internationale de ne donner qu’une version des événements, celle des Palestiniens» et, sans même s’en rendre compte, illustrera par l’exemple ce qui lui est reproché: «Ce qui a mis le feu aux poudres, c’est la visite-provocation d’Ariel Sharon, le chef du Likoud (droite nationaliste), sur le lieu saint musulman qu’est l’esplanade des mosquées»30. Outre son regard manichéen sur le déclenchement de l’Intifada, peu importera pour Agnès Gorissen le fait que le troisième «lieu saint musulman qu’est l’esplanade des mosquées» est également «le premier lieu saint juif qu’est le mont du Temple».

Dans un autre article, c’est l’association israélienne des «Victimes de la Terreur Arabe» qui, venue à Bruxelles en novembre 2001 pour y déposer une plainte contre Yasser Arafat, sera présentée par les journalistes Serge Dumont et Agnès Gorissen comme étant une «organisation d’extrême-droite»31. En réalité, cette association n’était rien d’autre qu’un rassemblement de quidams israéliens qui, du jour au lendemain, ont vu leur vie tragiquement basculer du fait du terrorisme palestinien: Ouriel Maoz a perdu sa jeune sœur alors qu’elle déjeunait dans une pizzeria de Jérusalem; la fille, le fils et le gendre de Frida Sweri sont tombés sous les balles de tireurs embusqués alors qu’ils circulaient en voiture; Irena Rudin a perdu sa fille de 18 ans qui fêtait la réussite de ses examens dans une discothèque branchée de Tel-Aviv. Si les civils israéliens victimes du terrorisme sont, pour Dumont et Gorissen, des fascistes, l’on peut aisément imaginer les sentiments qu’ils nourrissent à l’égard des soldats de Tsahal.

Quelques jours plus tard, Agnès Gorissen adoptera une position diamétralement opposée lorsqu’elle relate l’acte d’un Palestinien qui, aux commandes de son véhicule, a foncé sur des Israéliens massés à un arrêt d’autobus à Tel-Aviv, tuant huit personnes. La journaliste indulgente écrira que Khalil Abou Elba, l’auteur de l’attentat, a «disjoncté». Les témoignages énoncés dépeindront Abou Elba comme un paisible père de famille. «Il n’était pas particulièrement religieux, ni engagé politiquement, rien. C’était juste une personne normale». La journaliste expliquera enfin l’acte par «un désespoir capable de transformer un Khalil en chauffeur meurtrier»32.

C’est en faisant preuve d’une même logique qu’Agnès Gorissen et sa consœur Anne-Cécile Huwart dresseront le portrait de Khalil al-Nawareh, l’un des 13 terroristes exilés suite à l’occupation palestinienne, suivi du siège israélien, de la Basilique de la Nativité. Les deux journalistes ne tariront pas d’éloges à l’égard de cet ancien membre des Tanzim: «Il suit des cours de langue, apprend un métier. (…) Il évolue dans une ambiance familiale. (…) Il vit, tout simplement, goûtant aux joies simples du bowling. (…) Plusieurs sources bien informées s’accordent pour dire que Khalil se conduit en Belgique de façon plus qu’exemplaire. (…) Il semble bien que le jeune Palestinien ne correspond pas tout à fait au profil dressé par Israël. Il se murmure même que la Sûreté belge aurait démonté la plupart des accusations que l’Etat hébreu avait inscrites dans son dossier»33. La suite des événements allait contrarier la vision romantique de Gorissen et Huwart, lorsque Khalil al-Nawareh sera arrêté pour avoir participé – quatre mois après avoir été présenté comme le gendre idéal dans les colonnes du Soir – à l’attaque à main armée d’un bureau de poste dont le butin de 213.000 Euros aurait servi à financer l’Intifada.

Serge Dumont, correspondant permanent du Soir en Israël, répond également à la ligne éditoriale de la cellule «Proche-Orient» du quotidien. En janvier 2004, le journaliste écrivait que la Convention du Likoud – parti du Premier ministre israélien Ariel Sharon – réunissait une assemblée «majoritairement composée d’éléments d’extrême droite», et il présageait l’arrivée au pouvoir de «personnalités encore plus extrémistes que les ministres du Likoud déjà en place»34. Autre fait troublant, la façon dont Serge Dumont relatera l’assassinat en Cisjordanie de Massoud Mahlouf Allon, un Israélien qui avait pour habitude de se rendre dans les villages arabes de la vallée du Jourdain. Alors que le quotidien israélien Haaretz expliquait la présence d’Allon en Cisjordanie par le fait qu’il «avait l’habitude de collecter des vêtements usagés et des couvertures pour les distribuer aux Bédouins et aux Palestiniens»35, Dumont écrira que l’Israélien se trouvait là parce qu’il «avait pour habitude de se rendre dans les villages palestiniens pour y acheter des légumes à bas prix»36. Altruisme versus mercantilisme.

Le journaliste Baudouin Loos, lui aussi dédié à l’actualité proche-orientale pour le quotidien, dénoncera l’enfermement d’»une population de plus de trois millions d’âmes dans des réserves»37 et «l’érection d’un mur qui déchire la Cisjordanie»38. Ailleurs, on le verra gratifier le Premier ministre israélien du titre de «parrain en chef»39 et utiliser le terme «résistance»40, même s’il en dénoncera les excès, pour évoquer le terrorisme palestinien.

Force est de constater que le rapport du Soir envers Israël relève de l’obsessionnel. Pour le quotidien, l’information israélienne semble même parfois primer sur l’actualité belge. Ainsi, le 3 novembre 2003, le hasard voudra qu’une grève se déclenche simultanément en Belgique et en Israël. Si l’action syndicale en Israël n’aura duré que 4 heures, la grève en Belgique durera, elle, 24 heures. Sur le site Internet du quotidien, la grève israélienne sera expliquée au lecteur en 2.687 caractères41, tandis que 2.149 caractères42 suffiront pour relater la grève locale. Une semaine plus tard, c’est la cybercriminalité qui servira de trait d’union entre les actualités belge et israélienne. Ce jour-là, Le Soir consacrera 1.407 caractères43 à l’ouverture du premier procès que la Belgique ait connu dans le cadre d’une affaire de piratage informatique. Le même jour, ce sont 1.683 caractères44 qui seront alloués à l’ouverture, à Jérusalem, d’un procès contre un hacker accusé d’avoir piraté le site du Mossad. On pourrait en rire – si ça n’en devenait parfois tragique –, à l’instar de la Une du 22 avril 2002 qui titrera «Manifestation antisémite» l’article évoquant le rassemblement de 2.000 membres de la communauté juive venus se recueillir devant une synagogue attaquée, trois semaine auparavant, à l’aide de bouteilles incendiaires.

La tribune du Soir sera lieu de sérieux dérapages, notamment lorsque la parole est donnée, en décembre 2001, à Simon-Pierre Nothomb. De retour de Gaza, celui-ci écrivait que les soldats israéliens «suscitent puis mitraillent quotidiennement la fronde des enfants. (…) Les soldats israéliens puisent dans l’arsenal du passé tous les moyens de vexation, de confiscation, de torture mentale dont ils ont été les victimes. (…) Le paysage de la Cisjordanie est hallucinant. Comme la Pologne des années noires, il est aujourd’hui parsemée de camps de concentration. (…) La bande de Gaza, elle, est une prison en surpeuplement. Il faut la parcourir en relisant l’histoire du ghetto de Varsovie. (…) Comme à Varsovie, en 1941, on exige aujourd’hui des autorités locales de livrer sans discuter des administrés selon des listes établies par les autorités occupantes. (…) À Jérusalem, l’emprisonnement des Palestiniens est plus subtil. S’ils quittent leur maison quelques heures ou quelques jours, elle est aussitôt investie par des immigrants juifs» 45.

Deux mois plus tard, François de Cugnac utilisera, à l’instar de Simon-Pierre Nothomb, les colonnes du Soir pour véhiculer l’insupportable amalgame qui voudrait faire du rescapé d’Auschwitz le géniteur du nazi contemporain: «Depuis des années je parcours les écoles pour faire connaître aux jeunes les horreurs du nazisme. (…) Juif, mon Ami, tu honores les Justes (…) et tu massacres sans pitié ceux que tu as chassé de leurs maisons, de leurs terres, de leur patrie. Juif, mon Ami, as-tu perdu ces valeurs spirituelles qui t’ont permis de survivre au travers de toutes ces persécutions que tu as subies, pour profiter de ta force en infligeant à un peuple plus faible que toi la déportation dans des camps de réfugiés indignes de l ‘humanité? (…) Juif, mon Ami, toi qui as subi les pires humiliations, tu humilies chaque jour un peuple parce qu’il est plus faible que toi»46.

Que Simon-Pierre Nothomb et François de Cugnac aient puisé leur inspiration aux sources de la fantasmagorie antisémite et de la banalisation de la Shoah n’empêchera pas la diffusion de leur prose. Des écrits qui vaudraient probablement à une publication d’extrême-droite de sérieux ennuis, passeront allègrement les filtres de la rédaction du premier quotidien francophone de Belgique. Enfin, comment interpréter cette illustration47 d’un Ariel Sharon penaud qui, encadré par deux policiers belges au profil effilé, se verra affublé d’un nez emprunté aux caricatures qui ont jalonné l’histoire de l’antisémitisme?

La Radio-Télévision belge de la Communauté française (RTBF) regroupe en son sein les trois chaînes de télévision et les cinq chaînes de radio publiques francophones que compte le Royaume. On retrouvera à la RTBF cette propension à alimenter la dichotomie bourreau-victime qui, dans le cadre du conflit israélo-palestinien, prévaut sur la scène médiatique belge.

En novembre 2001, le Premier ministre belge Guy Verhofstadt présidait la délégation de l’Union européenne en visite en Israël. À l’issue de la rencontre avec son homologue israélien, Guy Verhofstadt tiendra avec Ariel Sharon une conférence de presse au cours de laquelle le Premier ministre israélien, selon la RTBF, demandait «à l’Union européenne de ne plus envoyer d’argent à l’Autorité palestinienne. Votre argent, a-t-il dit, sera utilisé pour acheter des armes de combat, des armes utilisées contre Israël»48.

À la lecture des minutes de la conférence de presse, l’on est en droit de s’interroger sur les règles journalistiques adoptées par la rédaction de la chaîne publique. En effet, replacés dans leur contexte, les propos d’Ariel Sharon prendront un tout autre sens: «Je vous appelle à aider le peuple palestinien en construisant des usines, en établissant des infrastructures et en investissant dans l’industrie palestinienne. Ne transférez pas vos fonds à l’Autorité palestinienne, car dans ce cas, votre argent servira à acheter des armes et du matériel militaire, des armes qui seront dirigées contre l’Etat d’Israël. Votre rôle aujourd’hui est d’investir dans les gens»49.

C’est une autre manipulation grossière qui vaudra à la RTBF et à trois de ses journalistes d’être poursuivis devant les tribunaux par 164 plaignants pour «incitation à la haine raciale», suite à la diffusion d’un reportage sur le sac – perpétré par des Palestiniens armés – de la Basilique de la Nativité50. En effet, en totale contradiction avec la dépêche de l’agence de presse Reuters utilisée pour réaliser le reportage incriminé, la journaliste Pascale Bourgaux avait désigné les Israéliens comme étant les auteurs des pillages sacrilèges commis dans la Basilique de la Nativité (la dépêche Reuters précisait pourtant clairement que les «Palestiniens armés, (…) les hommes armés ont «tout volé» dans l’église»51).

Lourde accusation lorsque l’on connaît, d’une part, la valeur hautement symbolique du lieu de naissance du Christ et, d’autre part, l’historique des relations, aujourd’hui cordiales, entre Juifs et Chrétiens. Le pasteur américain de Denver qui, après avoir vu «La Passion» de Mel Gibson, a déployé sur le parvis de son église une banderole reprenant le message «Les Juifs ont tué le Seigneur Jésus» illustre que le concept pré-Vatican II du «peuple juif déicide» reste présent dans l’esprit de ceux qui n’attendent qu’une étincelle pour s’enflammer. Et les propos récemment tenus par le cardinal belge Gustav Joos, pour qui «le maniaque sexuel Bill Clinton a été élu grâce au soutien des juifs»52, attestent également de la sensibilité du sujet.

Devant le tribunal, Pascale Bourgaux plaidera la fatigue et un manque de connaissances de la région pour tenter d’expliquer la faute (sans préjuger d’une quelconque relation de cause à effet, on pensait pouvoir attendre de la part de la fille de Jacques Bourgaux, l’avocat en Belgique de Yasser Arafat et d’autres intérêts palestiniens, une meilleure appréhension de la problématique israélo-palestinienne).

Cette affaire se soldera par l’acquittement, le 20 avril 2004, de la chaîne publique ainsi que de ses trois journalistes, mais ceux-ci n’échapperont pas pour autant à une sévère critique de la part des juges belges qui dénonceront le «travestissement de la réalité en raison d’un traitement aussi hâtif qu’inapproprié des données fournies par les agences de presse». Parlant de «mésinformation» dans le chef des accusés, le tribunal poursuivra en soulignant que «le résultat de cet égarement du sens critique fut certes de prêter au gouvernement, du moins à l’armée israélienne un comportement ouvertement hostile et méprisant à l’égard de lieux saints et de symboles majeurs du christianisme, qui n’est pas sans rappeler les accusations de profanation et de meurtres rituels de chrétiens qui ont nourri pour une large part l’antisémitisme traditionnel en Occident et déclenché les nombreuses persécutions des juifs réputé être un "peuple déicide et maudit"« et «que de telles connotations sont certes de sinistre mémoire et que l’on peut comprendre que les parties civiles s’en soient émues au plus haut point».

Et les juges de conclure ainsi: «S’il est parfaitement légitime et même salutaire pour un journaliste d’assumer pleinement un regard critique dans le traitement de l’information télévisuelle sur l’action des gouvernements et des états quels qu’ils soient, il lui faut toutefois faire preuve de vigilance dans l’exercice de celui-ci, se garder en particulier d’une certaine dérive de l’esprit critique qui en diabolisant l’action de l’état hébreu et de son gouvernement risque non pas de favoriser directement l’antisémitisme mais de justifier sinon la complaisance, du moins la passivité des opinions publiques et des gouvernements à l’égard d’une «nouvelle judéophobie» qui se développe avec force dans certaines minorités musulmanes en Europe et dont nombres d’évènements inquiétants apportent la preuve dans l’actualité récente».53

Le site Internet de la chaîne publique sera également le théâtre de sérieux dérapages. Les plaintes de nombreux internautes, mais surtout l’interpellation des pouvoirs publics par ces derniers, auront été nécessaires pour que la rubrique « Proche-Orient» du site de la RTBF soit revue fin 2001. Jusque-là, cette rubrique renvoyait l’internaute vers 13 sites palestiniens, contre un seul israélien. Le site du Hamas comptait parmi les 13 sites palestiniens référencés par la RTBF, et bien que l’internaute se trouvait ainsi à portée de souris de la «Glory of Record» – la liste exhaustive, photos à l’appui, des attentats commis par l’organisation terroriste – la chaîne publique ne jugera pas utile d’avertir l’internaute quant à la teneur du site proposé, ni même sur l’idéologie véhiculée par le Hamas. Comment expliquer dès lors que, sous l’unique site israélien référencé, celui du ministère des Affaires étrangères de l’Etat hébreu, il était précisé que «de nombreux groupuscules violents israéliens, responsables, comme le mouvement Kahane, d’actions comme le massacre d’Hébron de 1994, possèdent également de nombreux sites prônant la violence»?

Ces exemples illustrent la ligne éditoriale adoptée par la RTBF dans le conflit israélo-palestinien. On ne s’étonnera plus, dès lors, d’apprendre que, pour la radio-télévision publique francophone belge, le Hamas fait partie des mouvements islamistes «modérés (…) qui acceptent le jeu institutionnel et refusent tout recours à la violence»54, d’entendre sur les ondes de la RTBF un journaliste dénoncer le «terrorisme d’Etat» pratiqué par un «Israël hors-la-loi (…) qui asphyxie le peuple de Palestine»55, ou de lire une dépêche titrée «Le terrorisme juif»56, quand on sait que la chaîne publique se cantonne à l’usage des termes «activistes» et «militants» lorsqu’elle évoque les terroristes palestiniens.

D’autres acteurs médiatiques, probablement enivrés par l’anti-israélisme ambiant, laisseront désormais libre cours à la prose la plus nauséabonde qui soit. On en verra l’application dans l’hebdomadaire néerlandophone à grand tirage P-magazine, à la lecture de cet éditorial signé par Rudolphus De Groote:

«Je n’aime pas la forme du pays Israël. Pour moi, la forme est beaucoup trop étroite et beaucoup trop longue. Ça me fait penser à un ver solitaire.
Je n'aime pas la politique du pays Israël. Pour moi, la politique est bien trop féroce et n'a aucun respect pour la population d’origine. Ça me fait penser à un ver solitaire.
Je n'aime pas la religion juive du pays Israël. Pour moi, la religion est trop arrogante et vit implacablement aux crochets d’un sentiment de culpabilité collective vieux d’il y a plus d’un demi-siècle. Ça me fait penser à un ver solitaire. Je ne suis pas antisémite. C'est un titre qui revient à Israël. Les Palestiniens sont des Sémites. Israël assassine systématiquement des Sémites. Israël a, depuis sa création en 1948, élevé l'antisémitisme au rang de culture populaire et fait du terrorisme d’Etat une marque commerciale.
Je ne suis pas anti-Juif. C'est un titre qui revient à Israël. Un état démocratique qui choisit pour Premier ministre un criminel contre l'humanité ne s'aime pas. Israël a épuisé le sentiment anti-Juif qu’il attribue aux autres et l'a utilisé comme bouclier pour excuser une hécatombe.
Je n’aime pas l’Israël de Sharon, comme je n’aime pas le Cambodge de Pol Pot, la Russie de Staline et le Chili de Pinochet. La seule différence entre ces noms et Sharon réside dans le fait que ce dernier n’appartienne pas encore au passé.
Que Sharon paraisse encore un jour devant le juge pour ses actes de barbarie n’est que d'un intérêt secondaire. Ce qui est digne d'intérêt, c'est que le crédit international d'Israël s'épuise petit à petit. Lentement mais sûrement, l'Europe se libère du fardeau qu’elle supporte depuis la seconde guerre mondiale.
Au fond, c’est bizarre qu’il ait fallu tellement de temps pour que le monde se rende compte qu’un génocide n’en justifie pas un autre. Un énième monument ou musée érigés sous la pression des industriels de l’holocauste ne serviront plus à rien. Danser sur les cadavres des ancêtres est indécent. Le temps est venu d’un musée pour Sabra et Shatila, un monument pour les enfants palestiniens assassinés, et un nouveau repentir européen. On peut rajouter sur la Tour de l’Yser 57 le texte: «Plus jamais aveugle»
».58

Quelques lignes auront suffi pour que De Groote étale son venin antisémite, dénonce les «industriels de l’holocauste», renoue avec la terminologie nazie de la «vermine juive», ressuscitée, pour l’occasion, sous la forme d’un ver solitaire, et substitue au Juif d’Auschwitz le Palestinien de Ramallah. Quelles peuvent donc être les motivations de l’auteur de ce texte aussi absurde que scandaleux? Et quels seront les effets d’un tel texte sur le lectorat, essentiellement jeune, de P-magazine?

L’«affaire Sharon»

En 1993, le Parlement belge dotait le pays d’une loi dite de «compétence universelle» qui permettait de poursuivre les auteurs présumés de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide, même s’ils avaient été commis hors de la Belgique, par des non-Belges, et contre des non-Belges. C’est sur base de cette loi que, le 18 juin 2001, 23 plaignants libanais et palestiniens saisissaient les tribunaux belges pour que soient jugés les auteurs du massacre de Sabra et Chatila commis en 1982. Dans l’acte d’accusation, nulle mention n’était faite du responsable reconnu du carnage, Elie Hobeika59, seuls Ariel Sharon – ministre de la Défense à l’époque des événements – et deux autres officiels israéliens étaient incriminés. Il semblait dès lors manifeste que derrière cette prétendue soif de justice se cachait un procès d’intention, mais la suite de l’histoire montrera que cette évidence n’empêchera pas certains de sonner l’hallali.

De la trentaine de plaintes déposées à Bruxelles en vertu de la loi de compétence universelle – visant notamment Saddam Hussein, Yasser Arafat, Fidel Castro, Hissène Habré et Augusto Pinochet –, seule celle déposée contre le Premier ministre israélien aura les faveurs de la presse. Cette affaire, qui empoisonnera deux années durant les relations belgo-israéliennes, sera pour certains acteurs médiatiques et politiques l’occasion d’en rajouter une couche à la diabolisation de l’Etat hébreu et de ses citoyens. Les intitulés des articles publiés en moins d’une semaine par Le Soir – le quotidien francophone le plus lu en Belgique – en donnent un aperçu: «Ces Israéliens pleins de haine…»60, «Israël étudie ses représailles»61, «Le Mossad se penche sur la Belgique»62, «Une ligne dure contre la Belgique»63, etc.

Sur le plan politique, le sénateur écologiste Josy Dubié comptera parmi les plus virulents accusateurs du Premier ministre israélien. Président de la «Commission Justice» du Sénat, il occupait alors une place de choix et ne se privera pas, malgré le devoir de réserve lié à sa fonction, d’alimenter la polémique. En novembre 2001, une dépêche de l’agence de presse Belga relatait que «Josy Dubié s’en est pris violemment aux autorités israéliennes, jeudi, à l’occasion d’une conférence de presse. (…) «La Belgique est un Etat de droit, et moi, je m’interroge sur ce qui fait la démocratie en Israël. Nous au moins, nous n’avons pas de sang sur les mains» a-t-il ajouté, dénonçant également l’attitude d’Israël «qui viole toutes les lois internationales»»64.

En janvier 2002, le sénateur et trois de ses collègues parlementaires se rendaient au Liban, dans le cadre d’une mission d’information sur les événements de Sabra et Chatila. Sur place, Josy Dubié affirmera que «le gouvernement Sharon pratique actuellement des massacres qui sont totalement inacceptables. (…) Nous sommes sûrs que la responsabilité des autorités israéliennes, et particulièrement celle du ministre de la Défense d’alors Ariel Sharon, est évidente. Il est impliqué. Il ne l’a [le massacre de Sabra et Chatila] pas seulement permis, il l’a encouragé»65. À Beyrouth, lors d’une conférence de presse donnée par les sénateurs belges, ceux-ci déclareront: «Nous sommes du côté de la justice. Entre 1943 et 1945, elle était avec les juifs, aujourd’hui, elle est du côté des Palestiniens»66.

Dans la foulée, les parlementaires demanderont, contre toute attente, l’ouverture d’une instruction à l’encontre de Shimon Peres pour des faits qui, alors qu’il était Premier ministre, causèrent la mort d’une centaine de Libanais du village de Kana en 1996. Ils déclareront que «le lauréat du prix Nobel de la paix devait être jugé pour crimes de guerre»67. Toujours durant leur périple libanais, l’un des sénateurs, Vincent Van Quickenborne, précisera lors d’une visite chez le secrétaire général du Hezbollah que «l’idée de l’Union européenne d’inclure le Hezbollah dans la liste des organisations terroristes est très mauvaise»68.

Bien que les socialistes francophones seront, avec les écologistes, les plus ardents défenseurs de la plainte déposée contre le Premier ministre israélien, c’est la maladresse d’un des leurs, le député Patrick Moriau, qui allait enterrer la loi de compétence universelle et, ce faisant, l’action engagée contre Ariel Sharon. En effet, en soutenant la plainte déposée le 18 mars 2003 par des Irakiens contre l’ancien président américain George Bush Sr, Dick Cheney, Colin Powell et Norman Schwartzkopf pour des faits commis pendant la guerre du Golfe en 1991, le député socialiste allait impliquer les Américains dans le débat. Les Etats-Unis n’étant pas Israël, ce nouvel abus ne laissera d’autre choix aux autorités belges que de mettre un terme à la polémique, en abrogeant la loi.

Jusqu’au bout, quelques parlementaires se battront pour qu’Ariel Sharon soit malgré tout convoqué devant les tribunaux bruxellois. Ce fut notamment le cas, à la fin du mois de mars 2003, lorsqu’un amendement fut voté par le Parlement afin d’éviter les usages abusifs de la loi et que la socialiste Karine Lalieux parvint à faire passer, à l’arraché, un bien singulier sous-amendement qui stipulait que la disposition votée ne serait valable que pour les plaintes déposées en Belgique après le 1er juillet 2002. De cette manière, elle neutralisait la plainte déposée la semaine précédente contre les dirigeants américains, faisant ainsi baisser la pression, tout en s’assurant de la poursuite de la procédure entamée contre le Premier ministre israélien. Ce ne sera qu’une victoire de courte durée car la multiplication des plaintes farfelues – contre le Britannique Tony Blair, l’Américain George W. Bush et le ministre belge des Affaires étrangères Louis Michel – et la menace de voir le siège de l’OTAN quitter la capitale auront définitivement raison de la loi controversée, abrogée en juin 2003.

Quelques voix notables s’élèveront pour dénoncer le dévergondage politico-judiciaire de «l’affaire Sharon». En mars 2003, Jean-Pierre et Luc Dardenne, cinéastes belges «palmés» au Festival de Cannes en 1999 avec leur film «Rosetta», feront part de leur malaise à travers un texte intitulé «Nous comprenons l’indignation des Israéliens» et publié dans Le Soir: «Ce que nous trouvons inquiétant est la dimension ultra-médiatique qui s'est emparée du processus de la plainte contre Ariel Sharon, et cela dès le premier stade de ce processus, avant même de savoir si elle sera fondée et pourra être effectivement reçue. Cette focalisation sur la personne d'Ariel Sharon est d'autant plus troublante qu'elle fait oublier que le seul responsable attesté des massacres de Sabra et Chatila est le commandant des phalanges chrétiennes libanaises, Elie Hobeika. (…) Ne peut-on craindre qu'à travers cette médiatisation incontrôlable le dépôt d'une plainte dans le cadre de la loi sur la compétence universelle ne serve d'abord de tremplin à des campagnes de dénigrement, à des stratégies de déstabilisation d'un individu et à travers lui d'un Etat?»69.

Si les frères Dardenne étaient, jusque-là, unanimement salués pour leur œuvre empreinte d’humanisme, les amis d’hier eurent tôt fait de prendre leurs distances. Au lendemain de la diffusion du texte des deux cinéastes, une brochette de syndicalistes et d’élus socialistes – Karine Lalieux et Pierre Galand entre autres – rétorqueront à travers les colonnes du même quotidien: «De tous les combats sociaux, pour preuve encore votre présence à côté des sidérurgistes liégeois, toujours à dénoncer les inégalités quelles qu'elles soient, vous vous retrouvez, malgré vos dénégations, à défendre Ariel Sharon! (…) Chers Frères Dardenne, vous qui en deux heures d'émotions autour de la vie particulière de Rosetta avez dénoncé les conditions d'existence de toute une frange de la société, aujourd'hui dans une carte blanche, vous oubliez l'universalité du droit à la justice pour tous. (…) Votre carte blanche dans le premier quotidien francophone belge participe d'une médiatisation, non pas incontrôlable, mais tronquée»70.

Pour Claude Demelenne, journaliste à l’hebdomadaire Le Journal du Mardi, les deux «lascars pro-Sharon» Jean-Pierre et Luc Dardenne «‘commettent’ leur diatribe au moment précis où les parlementaires vont passer à l'acte et adopter le projet de loi de compétence universelle ou baisser pavillon devant les pressions, essentiellement du lobby ultra-sioniste». À court d’arguments, le journaliste envisagera enfin que «les deux frères – qui ne s’étaient jamais exprimé sur la question – pourraient avoir été instrumentalisés [car] certains faits, troublants, lèvent le voile sur ce qui ressemble à une offensive concertée»71… par un mystérieux lobby à la solde de l’Etat d’Israël.

C’est probablement Victor Dutroux, père du tristement célèbre pédophile Marc Dutroux, qui apportera la cerise au gâteau en déclarant à la télévision belge qu’ «Ariel Sharon, ça c’est un monstre! (…) Marc Dutroux n’est pas un monstre. C’est un bien grand mot»72.

Actions et inaction politiques

La judéophobie qui s’est développée ces dernières années en Belgique est très proche de celle qui sévit en France depuis le mois d’octobre 2000. Mais, si les autorités françaises ont fait preuve ces derniers mois de leur détermination à combattre de manière concertée ce fléau, tel ne semble pas encore être le cas en Belgique. On peut même dire de l’échiquier politique belge que, s’il compte quelques pompiers, ne manque pas de pyromanes. C’est principalement au sein de la gauche, socialiste et écologiste, que l’on retrouve ceux qui, par leurs déclarations sur le conflit israélo-palestinien, ont participé à l’échauffement des esprits.

Depuis 1988, les socialistes dirigent la Belgique avec, au gré des résultats électoraux, les sociaux-chrétiens, les libéraux ou les écologistes. L’aile francophone du Parti socialiste (PS), bien discrète lorsque les bus explosent en Israël, ne manquera pas une occasion pour vilipender l’Etat hébreu. En mars 2001, le PS «condamne la politique menée par le Gouvernement israélien qui recourt à des mesures discriminatoires et contraires aux droits de l’Homme comme la politique de colonisation, le blocage des fonds dus à l’Autorité palestinienne, le déni de justice ou encore le blocus “d’étranglement”»73. Suite à l’intervention américano-britannique en Irak, le président du PS, Elio Di Rupo, déclarait que «le risque est grand que le gouvernement Sharon profitera de ce que l’attention du monde se focalise sur l’Irak pour décimer plus encore les populations palestiniennes»74. C’est encore lui qui, pour faire taire la polémique née autour de la présence de Pierre Galand sur les listes socialistes, écrira que «Pierre Galand est un Juste». L’utilisation de la majuscule pour qualifier de «Juste» la star de l’antisionisme locale n’aura pas échappé à certains. Dans un tel contexte, l’appel lancé par Elio Di Rupo «à tous les progressistes, laïcs, chrétiens et musulmans, au monde associatif, aux altermondialistes»75 à rejoindre le PS aura particulièrement ému les «oubliés» du président.

Plus récemment, c’est l’eurodéputée socialiste Véronique De Keyzer qui a apporté sa pierre à l’édifice de la nazification de l’Etat juif quand, de retour de Cisjordanie, elle déclarait: «On est revenu horrifiés. (…) On a trouvé que ce mur n'était pas un mur de sécurité, mais que c'était un mur d'apartheid. Les murs sont équipés de caméras de surveillance, il y a tous les X mètres des miradors avec des soldats qui surveillent. Que là où il n'y a pas de mur en béton, il y a des barbelés, et on a vraiment l'impression de camps de concentration. C'est la première image qui vient à l'esprit, et c'est une image terrible pour nous, qui avons toujours soutenu Israël à cause de la souffrance de la seconde guerre mondiale, de revoir, pour certains d'entre nous, des images qu'on n'aurait plus jamais voulu voir»76.

En avril 2002, le sénateur libéral flamand Jean-Marie Dedecker, ex-entraîneur de l’équipe nationale de judo, passait deux journées dans la bande de Gaza et en Cisjordanie. De retour en Belgique, il déclarera: «C’est terrible, horrible, ce qui se passe là-bas; ils [les Israéliens] ne tuent pas seulement les gens avec les armes, ils les affament et étranglent leur société. (…) Ils font de la Cisjordanie un camp de concentration»77. Le lendemain, il ajoutera que «Gaza peut aisément être comparé à un grand camp de concentration. (…) Il y a une forte ressemblance avec ce qu’il s’est passé à Sabra et Chatila»78. En juillet 2003, Jean-Marie Dedecker confessait que «si je devais vivre en Israël et que j’étais Palestinien, je deviendrais moi-même un terroriste», pour ensuite mettre dans la bouche d’une tierce personne que «si les Israéliens continuent ainsi, ils préparent leur deuxième holocauste»79.

En Flandre, le parti d’extrême-droite Vlaams Blok (VB) glane aujourd’hui un cinquième de l’électorat flamand. Karel Dillen, nostalgique de l’ère nazie et auteur de la traduction en néerlandais du premier livre négationniste, «Nuremberg ou la terre promise»80, sera le co-fondateur, en 1977, du VB dont il assumera la présidence jusqu’en 1996. La jeune garde qui succèdera à Karel Dillen adoptera, du moins en façade, une image plus policée. C’est ainsi que, pour la première fois, un parlementaire du VB se rendait à une cérémonie de commémoration de la Nuit de Cristal, organisée à Gand en novembre 2002. À Anvers, où le parti extrémiste recueille le suffrage d’un électeur sur trois, son candidat au maïorat Filip Dewinter redoublera d’efforts pour séduire un vote juif historiquement hostile. Il mettra à profit les violentes manifestations organisées par Abou Jahjah et l’AEL dans la métropole flamande pour lancer, sans grand succès, une opération de charme81. À Bruxelles, en avril 2002, quelques leaders du VB local voudront se joindre aux 2.000 membres de la communauté juive qui se recueillaient devant une synagogue qui avait été la cible de cinq cocktails molotov. Vertement accueillis par la foule, c’est sous l’escorte de policiers présents sur les lieux qu’ils devront précipitamment quitter les lieux.

En y regardant de plus près, on constatera que, outre la peu discrète idéologie raciste anti-arabe qui l’anime, le VB reste hanté par ses vieux démons. En février 2001, au cours d’une interview donnée à une télévision hollandaise, Roland Raes, alors vice-président du parti remettra en question le nombre de victimes juives de la Shoah ainsi que l’authenticité du Journal d’Anne Frank. Et, lorsque le journaliste lui demandera s’il doutait du fait que les chambres à gaz ont réellement existé à grande échelle, la réponse de Roland Raes fut: «Oui, j’ose en douter. Je pense que ce qui nous a été donné à croire sur certains points a été très exagéré»82. Les remous provoqués par ces déclarations obligeront ce dernier à démissionner de la vice-présidence du parti, même s’il y reste depuis actif.

Créé en 1951 par Karel Dillen, le mensuel d’extrême-droite Dietsland-Europa, décrit un jour par Filip Dewinter comme étant «la cellule de réflexion du Vlaams Blok», publiera dans son édition de novembre 2002 un texte d’Oswald Kielemoes. Ancien élu du VB et membre du bureau du parti, celui-ci écrivait que «les Juifs ont presque tous les médias de Grande-Bretagne entre leurs mains. (…) À travers ces médias, ils font la promotion uniforme, calculée, méthodique, immuable et intense de la transformation et de l’anéantissement de la Grande-Bretagne pour en faire un Etat multiracial et multiculturel, ils imposent aux Britanniques les intérêts d’Israël, contre la volonté et les intérêts des autochtones britanniques. En outre, que le terrible holocauste contre le peuple palestinien sans défense et innocent soit minimisé ou tu, va de soi. (…) Si les Britanniques, tant les Anglais que les Ecossais, les Gallois et les loyaux Nord-Irlandais veulent subsister, chacun avec leur propre culture, leurs us et coutumes, il est grand temps qu’ils brisent ce joug juif»83. Une fois repris par la presse démocratique, les propos d’Oswald Kielemoes ne laisseront d’autre choix au parti que de démissionner l’auteur du libelle antisémite.

Il semble donc que, malgré les efforts cosmétiques entrepris par l’actuelle direction du VB, la parole antisémite continue à proliférer au sein du parti extrémiste flamand. On en aura un exemple supplémentaire en janvier 2004, lorsque Carine Anseeuw, candidate sur les listes électorales du VB, s’exprimait dans un journal flamand en tant que chef de cabine de la compagnie aérienne belge Sobelair. Alors que l’avenir de la société d’aviation était en balance, elle commentera en ces termes l’éventuelle reprise de la Sobelair par deux hommes d’affaires belges renommés et de confession juive: «Je crois que la direction de la Sobelair a préparé un petit plan, précisément de vendre la société à ses amis juifs, Victor Hasson et Georges Gutelman, les rabbins de la banqueroute»84.

Les quelques voix politiques que l’on entendra dénoncer avec force et conviction les dérives antisémites et antisionistes émaneront presque exclusivement des rangs de la droite libérale. En novembre 2002, le ministre-président de la Communauté française Hervé Hasquin déplorera le fait que «la communauté juive a connu une année pénible comme jamais depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Or l’intégration sans renoncement à ses richesses et à ses valeurs dont la communauté juive a fait preuve en s’insérant véritablement dans le tissu social belge est exemplaire. Je répète encore: tolérance zéro pour ceux qui seraient tentés une fois de plus de considérer les citoyens belges appartenant à la communauté juive comme des boucs émissaires tout désignés pour subir des événements qui seraient importés chez nous de manière inacceptable»85.

L’eurodéputée libérale Frédérique Ries86, anciennement présentatrice-vedette et chef de rédaction du journal télévisé de la chaîne privée RTL-TVI, dénoncera à plusieurs reprises le climat antisémite et anti-israélien ambiant. Le 18 avril 2002, suite à l’incendie criminel qui aura entièrement ravagé un magasin d’alimentation kasher situé à Bruxelles, elle posait les questions suivantes: «Se trouvera-t-il encore, comme précédemment, des fins analystes pour balayer l’intention, parler plutôt, et encore, de «bêtise et de désinformation», et par là-même excuser l’inexcusable? Va-t-on continuer à accuser de jeter de l’huile sur le feu à ceux qui dénoncent ces actes odieux et lâches, attentats contre des juifs, attentats contre des innocents, attentats contre la démocratie? Faudra-t-il qu’il y ait un mort pour oser appeler les choses par leur nom?». Le mois suivant, Frédérique Ries mettra en cause l’intégrité d’une journaliste de la RTBF, suite à une énième «erreur»87 de la chaîne publique sur l’actualité israélo-palestinienne: «La journaliste passe ici, volontairement ou non (c’est tout le débat), de la subjectivité à la manipulation pure et simple. (…) Pourquoi aucun des filtres sensés prévenir de telles dérives n’a-t-il fonctionné? (…) Sait-on à cause de qui, comment et éventuellement pourquoi la vérité s’est retournée pour correspondre si parfaitement au courant aujourd’hui politiquement et médiatiquement correct? (…) Semer le doute et le feu dans les esprits est indigne»88.

En décembre 2003, le sénateur libéral François Roelants du Vivier exprimait également sa vive inquiétude face à la multiplication des incidents «renouant avec cette honteuse tradition européenne du juif bouc émissaire. Ainsi, l’antisémitisme se nourrit dans sa version contemporaine d’un conflit au Proche-Orient et du malheur de deux peuples, dont l’un, le peuple juif, est supposé être le bourreau de l’autre. Une certaine gauche bien pensante – mais bien peu progressiste – cultive la démonisation non pas d’un gouvernement mais d’un Etat, celui d’Israël, dont l’existence est présentée comme incongrue». Il conclura par un rappel aujourd’hui devenu nécessaire: «Les leçons du passé doivent servir. À tout jamais»89.

En février 2004, François Roelants du Vivier déposera, avec sa consœur libérale Christine Defraigne, une «proposition de résolution relative à la résurgence de l’antisémitisme en Belgique». Dans le texte soumis au Sénat, les deux parlementaires faisaient part de leur préoccupation face à «la montée en flèche de l’antisémitisme en Europe et notamment en Belgique. (…) Cette situation est intolérable. Il faut agir et mettre fin à ces attaques récurrentes contre les synagogues et les juifs. (…) Les Juifs de Belgique forment une minorité d’environ 40.000 personnes, la démocratie ce n’est pas seulement le vote majoritaire, c’est aussi, et peut-être surtout, la protection des minorités et le respect de leurs droits. Nous ne pouvons également que nous interroger sur l’influence de la perception erronée du conflit israélo-palestinien, diffusée par certains médias»90.

La dégradation de la situation ces dernières années amènera le Roi des Belges Albert II à sortir de la traditionnelle réserve liée à son rang. Le 21 juillet 2002, à l’occasion des célébrations de la Fête Nationale, il relèvera que «depuis quelque temps nous voyons resurgir en Europe certaines formes d’extrémisme. Et pourtant, après avoir subi les conséquences désastreuses de l’intolérance croissante des années 30, nous avions pensé être définitivement libérés de ce fléau. (…) La peur de l’autre est un sentiment qui engendre le racisme. (…) Ces derniers mois nous avons vécu chez nous les tristes effets de ce phénomène. Un couple marocain en a été la victime et a perdu la vie. D’autres communautés ne furent pas épargnées non plus comme en témoignent les attentats contre des synagogues. Il est inadmissible de chercher à importer chez nous les antagonismes qui existent au Moyen-Orient» 91.

Des lendemains incertains?

Volens nolens, les détracteurs de l’Etat hébreu auront, lentement mais sûrement, contaminé les esprits et, ce faisant, ravivé l’hydre antisémite. Ainsi, c’est après avoir vu un reportage du journal télévisé sur le «mur» qu’une Belge «de souche», caissière dans une grande surface du quartier chic de Bruxelles, déclarera en novembre 2003 à sa collègue: «T’as vu ce qu’ils ont fait en Palestine avec ce mur… Ah, les Juifs, il faudrait tous les brûler!».

De pareils excès rappellent les incidents qui jalonnèrent le long processus de déshumanisation qui a précédé le génocide des Juifs et des Tutsis. Dans les deux cas, des décennies furent nécessaires pour préparer les esprits à exterminer son voisin à coups de machette ou de Zyklon B… ou du moins à laisser faire. Aujourd’hui, c’est par un subtil effet domino que certains voudraient, en trois temps, dépouiller le trio Israélien/sioniste/Juif de son humanité.

Une lutte efficace et déterminée contre l’actuelle résurgence de l’antisémitisme ne pourra donc faire l’économie d’un débat sur la responsabilité des pyromanes de la pensée, qu’ils soient issus des rangs politique, médiatique, intellectuel, islamiste ou panarabe. Un éditorialiste du New York Times synthétisait habilement la situation: «Critiquer Israël n’est pas antisémite. Ne pas l’admettre est hypocrite… Mais faire d’Israël un objet singulier d’opprobre est antisémite, et ne pas l’admettre est malhonnête».

Pour mieux l’appréhender, il faudra ensuite admettre que la judéophobie contemporaine n’est plus exclusivement l’apanage des courants traditionnels d’extrême-droite. Les incidents évoqués dans la présente étude confirment que c’est essentiellement à l’opulente poitrine de l’islamo-gauchisme que l’antisémitisme aura été nourri ces dernières années. De même, on ne pourra d’avantage, au nom de l’antiracisme, taire la violence exercée par des membres d’une minorité, la communauté musulmane, sur les membres d’une autre minorité, la communauté juive. Ce n’est qu’après avoir adhéré à ces principes que l’on pourra faire reculer ce fléau qui, aujourd’hui, se sert du Juif-nation pour assouvir ses instincts les plus vils.

^ [1] Les actes antisémites survenus en Belgique depuis 2001 sont répertoriés sur le site www.antisemitisme.be.
^ [2] Troisième rapport sur la Belgique de l'ECRI (Commission européenne contre le racisme et l’intolérance), adopté le 27 juin 2003 et rendu public le 27 janvier 2004.
^ [3] Une enquête réalisée en 2002 par le «Centre de Recherche sur l’antisémitisme» de l’Université technique de Berlin, à la demande de l’Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes, relate que «depuis le début de l’Intifada al-Aqsa à l’automne 2000, le nombre d’actions violentes contre les Juifs et les institutions juives a augmenté, avec des auteurs présumés principalement issus des communautés arabes et musulmanes, spécialement ceux d’origine maghrébine».
^ [4] Fédération des Etudiants Francophones, «Motion d’actualité sur la situation de l’enseignement en Palestine», 6 février 2003.
^ [5] Ibidem.
^ [6] Fédération des Etudiants Francophones, «Motion de soutien de la FEF aux étudiants Palestiniens», 28 juin 2001.
^ [7] Collectif de 327 universitaires belges, «Appel en faveur de la paix au Proche-Orient», Le Soir, 22 avril 2001.
^ [8] Ibidem.
^ [9] Sara Brajbart, «Des étudiants juifs de l’Université libre de Bruxelles menacés de mort», Proche-Orient.info, 27 novembre 2002.
^ [10] Ibidem.
^ [11] François Robert, «Un acte antisémite secoue l’athénée», Le Soir, 20 novembre 2002.
^ [12] Marc Van Impe, «Het wondere leven van Abou Jahjah», De Standaard, 30 novembre 2002.
^ [13] www.arabeuropean.org.
^ [14] Stijn, «Islam en homofobie», Gay Belgium, 18 décembre 2002.
^ [15] Didier Burg, «Abou Jahjah s’exporte aux Pays-Bas», Le Soir, 4 mars 2003.
^ [16] Mia Doornaert, «En wat met het racisme van Abou Jahjah?», De Standaard, 29 novembre 2002.
^ [17] www.assabyle.com (fermé suite à une procédure judiciaire, remplacé depuis par www.ribaat.org).
^ [18] Cheikh Abou Al-Walid Al-Ansari, «La fin du «peuple d’Israël»: une vérité coranique», Assabyle.com, 2002.
^ [19] Cheikh Bassam Abou Ata Ayachi, «Lorsque la mort devient belle, Monsieur Sarkozy!», Assabyle.com, 2004.
^ [20] www.particp.be.
^ [21] www.oxfamsol.be.
^ [22] Françoise Germain-Robin, «Pierre Galand: nous voulons réveiller l’Europe», L’Humanité, 28 février 2002.
^ [23] Interview de Francine Naveaux par Françoise Berlaimont au Journal parlé de 13 heures, RTBF, 9 juillet 2002.
^ [24] www.association-belgo-palestinienne.be.
^ [25] Eric Picard, «La paix israélo-palestinienne n’a pas été conclue à Lessines», Agence diasporique d’information, 26 novembre 2002.
^ [26] Propos tenus lors d’une conférence à l’Université libre de Bruxelles, le 11 octobre 2001.
^ [27] www.indymedia.be.
^ [28] Texte intitulé «Complot contre Radio Islam», rédigé par Jessie et publié sur le site Indymedia.be le 23 mai 2003.
^ [29] Sondage «Flash Eurobaromètre» effectué par EOS Gallup Europe à la requête de la Commission européenne, novembre 2003.
^ [30] Agnès Gorissen, «Juifs, belges et viscéralement attachés à Israël», Le Soir, 27 novembre 2000.
^ [31] Serge Dumont et Agnès Gorissen, «Israël envoie paître les Européens», Le Soir, 19 novembre 2001.
^ [32] Agnès Gorissen, «La lassitude désespérée des Palestiniens», Le Soir, 1er octobre 2001.
^ [33] Agnès Gorissen et Anne-Cécile Huwart, «Le banni de Bethléem parle au «Soir»», Le Soir, 13 août 2002.
^ [34] Serge Dumont, «Ariel Sharon hué par les «ultras»», Le Soir, 6 janvier 2004.
^ [35] Jonathan Lis, Arnon Regular et Jalal Bana, «Fatah terrorists kill man in Jordan Valley», Haaretz, 3 janvier 2003.
^ [36] Serge Dumont, «Raids et rafles se succèdent», Le Soir, 3 janvier 2003.
^ [37] Baudouin Loos, «Un ultimatum pour… gagner du temps?», Le Soir, 20 décembre 2003.
^ [38] Baudouin Loos, «Sharon donne-t-il ses chances à Abbas?», Le Soir, 13 août 2003.
^ [39] Baudouin Loos, «Sharon croit-il en la «feuille de route» de Bush?», Le Soir, 27 mai 2003.
^ [40] Baudouin Loos, «L’impasse désespérante», Le Soir, 6 octobre 2003.
^ [41] Dépêche AFP, «Israël en grève pour quatre heures», Le Soir en ligne, 3 novembre 2003.
^ [42] Dépêche Belga, «Mons sans bus jusqu’à mardi», Le Soir en ligne, 3 novembre 2003.
^ [43] Dépêche Belga, «Cybercriminel belge au tribunal», Le Soir en ligne, 10 novembre 2003.
^ [44] Serge Dumont, «Un «hacker» avait piraté le site du Mossad», Le Soir en ligne, 10 novembre 2003.
^ [45] Simon-Pierre Nothomb, «L’ordre va-t-il régner à Gaza?», Le Soir, 15 décembre 2001.
^ [46] François de Cugnac, «Juif, mon Ami», Le Soir, 13 février 2002.
^ [47] Illustration de Royer, Le Soir, 21 février 2003.
^ [48] «Rencontre Verhofstadt-Sharon», RTBF en ligne, 18 novembre 2001.
^ [49] Service de presse du Premier ministre de l’Etat d’Israël, 18 novembre 2001.
^ [50] Reportage de Pascale Bourgaux diffusé dans le journal télévisé de 13 heures, RTBF, 24 avril 2002.
^ [51] Dépêche de l’agence de presse Reuters du 23 avril 2002.
^ [52] R.C. (avec Belga), «Le cardinal Joos cloué au pilori», La Libre Belgique, 22 janvier 2004.
^ [53] Jugement du Tribunal Correctionnel de Dinant du 20 avril 2004. Ce jugement est définitif.
^ [54] Jonathan Crickx, «Qu’est-ce-que l’islamisme?», RTBF en ligne, 6 juin 2002.
^ [55] Hughues Le Paige, «Israël-hors-la-loi», RTBF (émission «Matin Première»), 2002.
^ [56] Renaud Dumesnil, «Le terrorisme juif», RTBF en ligne, 8 juin 2002. La dépêche relate l’arrestation par la police israélienne de 3 Israéliens accusés d’avoir fomenté un attentat contre une école arabe de Jérusalem.
^ [57] La Tour de l’Yser est un lieu de commémoration flamand de la Première Guerre mondiale. Les lettres AVV (Alles voor Vlaanderen: Tous pour la Flandre) et VVK (Vlaanderen voor Kristus: La Flandre pour le Christ) sont inscrites sur la Tour. À sa base, est inscrit «Nooit meer oorlog» (Plus jamais de guerre).
^ [58] Rudolphus De Groot, «De Vrijdenker», P-magazine, 7 décembre 2001.
^ [59] Elie Hobeika était à la tête de la milice des Phalanges chrétiennes qui ont perpétré le massacre de Sabra et Chatila en 1982. Dans le monde arabe, il est de notoriété publique que Hobeika a organisé les tueries. Le quotidien hachémite Jordan Times en atteste, le 17 septembre 2000, lorsqu’on y lit que «les familles des victimes [de Sabra et Chatila] pointent un doigt accusateur sur Elias Hobeika, ancien chef des services de renseignements des forces libanaises, qui est maintenant un membre sortant et pro-syrien du Parlement». En juin 2001, le commentateur politique palestinien Saleh Al-Na'ami écrit, dans l'hebdomadaire du Hamas Al-Risala, qu'«il est hypocrite d'attaquer Sharon». Al-Na'ami identifie nommément les coupables, les «vrais criminels de guerre: Hobeika et la bande de misérables de son entourage d'alors».
^ [60] «Ces Israéliens pleins de haine…», Le Soir, 15 février 2003.
^ [61] Serge Dumont, «Israël étudie ses représailles», Le Soir, 15 février 2003.
^ [62] Serge Dumont, «Le Mossad se penche sur la Belgique», Le Soir, 19 février 2003.
^ [63] «Une ligne dure contre la Belgique», Le Soir, 21 février 2003.
^ [64] «Josy Dubié s’en prend violemment aux autorités israéliennes», Belga, 29 novembre 2001.
^ [65] Hussain Abdul-Hussain, «Belgian senators decry Sharon as a «mass murderer»», The Daily Star (quotidien libanais anglophone), 22 janvier 2002.
^ [66] Scarlett Haddad, «Sabra et Chatila: Les sénateurs belges clôturent leur mission d’information sur les massacres. Josy Dubié: La responsabilité de Sharon et des soldats israéliens est évidente», L’Orient-Le Jour (quotidien libanais francophone), 22 janvier 2002.
^ [67] Yossi Melman, «Belgian lawmakers want Peres on trial for ’96 Grapes of Wrath», Haaretz, 22 janvier 2002.
^ [68] «Sabra et Chatila: Les sénateurs belges rencontrent Hoss et Nasrallah», L’Orient-Le Jour, 23 janvier 2002.
^ [69] Jean-Pierre et Luc Dardenne, «Nous comprenons l'indignation des Israéliens», Le Soir, 12 mars 2003.
^ [70] André Mordant, Joël Mathieu, Karine Lalieux, Jean Cornil, Pierre Galand, Isabelle Simonis, Serge Hustache, Annick Thyre et Jean-Claude Van Der Meeren, «Chers Frères Dardenne, nous ne comprenons pas votre indignation», Le Soir, 13 mars 2003.
^ [71] Claude Demelenne, «Pro Sharon. Les frères Dardenne ne font pas que du cinéma», Le Journal du Mardi, 18 mars 2003.
^ [72] Interview de Victor Dutroux dans l’émission d’information Telefacts diffusée le 1er septembre 2003 par la télévision flamande VTM.
^ [73] Communiqué de presse du Parti socialiste francophone de Belgique, 19 mars 2001.
^ [74] Elio Di Rupo cité dans un communiqué de presse du Parti socialiste francophone de Belgique, 23 mars 2003.
^ [75] Bénédicte Vaes, «Le PS effeuille sa rose mais garde son drapeau», Le Soir, 14 janvier 2002.
^ [76] Interview de Véronique De Keyzer dans le journal télévisé de 19h30, RTBF, 23 février 2004.
^ [77] Peter Beaumont, «I don’t want to be here… but what would you do?», The Observer, 7 avril 2002.
^ [78] Communiqué de presse co-signé par les parlementaires Jean-Marie Dedecker, Vincent Van Quickenborne et Jan Roegiers, «Impressions et conclusions sur la visite en Israël et en Palestine, du 4 au 6 avril 2002», 8 avril 2002.
^ [79] Interview de Jean-Marie Dedecker dans un hebdomadaire flamand à grand tirage, «Zelf terrorist worden», Humo, 18 juillet 2003.
^ [80] «Nuremberg ou la terre promise», écrit en 1948 par le négationniste Maurice Bardèche, beau-frère du collaborateur français Robert Brasillach, dénonce «l’imposture et les mensonges du procès de Nuremberg». Bardèche sera également à l’origine de la revue «Défense de l’Occident» qui publiera, entre autres, les écrits révisionnistes de Rassinier et de Faurisson.
^ [81] Dans un communiqué de presse diffusé le 4 avril 2002 par le Vlaams Blok, Filip Dewinter s’en prend virulemment aux autorités anversoises qui ont été «incapables de garantir la sécurité de la population anversoise» et, en particulier, de la «communauté juive».
^ [82] Andrew Osborn, «Belgium’s far right party in Holocaust controversy», Guardian, 9 mars 2001.
^ [83] Extraits cités dans l’article «Britten moeten joods juk afwerpen» rédigé par Marc Spruyt et publié le 16 novembre 2002 dans le quotidien flamand De Morgen. L’article original d’Oswald Kielemoes, intitulé «Joden domineren de Britse media», est paru dans le mensuel Dietsland-Europa, en novembre 2002.
^ [84] Interview de Carine Anseeuw, «Er is een overnemer, maar men wil hem niet», Het Laatste Nieuws, 8 janvier 2004.
^ [85] Discours prononcé par Hervé Hasquin lors du centenaire de la synagogue bruxelloise de l'avenue de Stalingrad, le 24 novembre 2002.
^ [86] En février 2004, Frédérique Ries sera nommée secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères du Gouvernement fédéral belge.
^ [87] Il s’agit de la manipulation suite à laquelle 164 personnes ont assigné la RTBF devant la Cour pénale pour «incitation à la haine raciale», suite à un reportage de Pascale Bourgaux, en date du 24 février 2002, sur le pillage de la Basilique de la Nativité.
^ [88] Frédérique Ries, «L’«erreur» de la RTBF», Regards, 28 mai 2002.
^ [89] Extraits de l’éditorial «L’amalgame scandaleux» de François Roelants du Vivier, publié dans l’édition du mois de décembre 2003 du bulletin d’information «Echos bruxellois» du sénateur Roelants du Vivier.
^ [90] «Proposition de résolution relative à la résurgence de l’antisémitisme en Belgique», déposée au Sénat belge en février 2004 par les parlementaires François Roelants du Vivier et Christine Defraigne.
^ [91] Discours prononcé par le Roi Albert II lors de la Fête Nationale belge, le 21 juillet 2002.